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Mardi 22 juillet 2008

Qui se couche tôt, se lève tôt. Premier réveil vers 4 h, puis prolongation jusqu'à 5 h 30, cela fait tout de même de bonnes heures de sommeil.
A 7 h, nous sommes les premiers au petit déjeuner. Sur la grande baie vitrée, la buée indique que la température est plutôt basse. Proche de zéro, selon le patron.
Tout en déjeunant, nous mettons de côté quelques tranches de pain, pour le pique nique de midi. Nous en chouravons d'autres en nous servant sur la table préparée pour les anglais.
Avant de partir, nous complétons notre menu en achetant un petit paquet de chips et une tablette de chocolat, le tout payé un bon prix. Avec les restes que nous avons, nous sommes parés !
Aujourd'hui, nous retournons sur les sommets en commençant par la longue montée du Grand Col Ferret. L'étape s'annonce difficile avec plus de 1000 m de dénivelé.
A 7 h 30, chaudement vêtus, nous quittons le gîte du Col de la Fenêtre, sans trop de regret, en ayant l'impression d'avoir séjourné dans un petit hôtel plutôt que dans un refuge et nous n'y avons pas trouvé toute la convivialité espérée.
En route pour l'Italie !

En sortant de Ferret, la direction du Grand Col Ferret est indiquée vers la droite. Nous laissons donc la route pour descendre, par un petit sentier en forte pente, jusqu'à la Drance de Ferret que nous traversons sur un pont de bois. De l'autre côté, la montée commence et aujourd'hui, il n'y aura pas d'échauffement !!!
Dès le pied, la pente est sévère. Nous grimpons dans un environnement alternant parties boisées et prairies tout en essayant de suivre une sente pas très bien marquée. Le franchissement de plusieurs clôtures électriques nous contraint à faire un peu de gymnastique matinale. Ces clôtures n'étant pas là par hasard, quelques mètres plus loin, nous nous retrouvons au milieu d'un très important troupeau de vaches. Quelques-unes sont campées au milieu du sentier, et prennent un malin plaisir à nous empêcher de passer. Leur regard bovin en dit long sur leur étonnement de voir passer ces curieux bipèdes équipés de leur sac à dos. Autour de nous, des génisses dévalent la pente au galop. Nous avons droit à un concert de beuglements et de tintement de cloches. Jouant les toréadors, nous poursuivons notre montée en essayant tant bien que mal d'éviter les bouses. Un peu plus haut, en passant à proximité d'abreuvoirs, nous finissons de "cirer" nos pompes en les enfonçant dans la boue. Le terrain bien travaillé par les vaches rend notre avancée délicate. Enfin, après avoir dépassé un troupeau d'hérens qui font bande à part, nous arrivons dans l'alpage.
Le décor change. La vue est superbe sur la vallée de La Fouly malgré les bancs de brouillard qui peu à peu s'élèvent et disparaissent dans le ciel.

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Au Crétet de Létémaire (1925 m), la vue du gîte du Col de la Fenêtre, maintenant beaucoup plus bas, nous apporte la confirmation de la difficulté de cette montée matinale .

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Dans l'alpage, sur le flanc nord de la Dotze, nous revenons pratiquement sur nos pas tout en continuant de grimper. Petite pause à une cabane de berger. C'est loin d'être le grand confort mais cet abri doit être très apprécié en cas de mauvaises conditions météo. Après une rapide visite des lieux, nous reprenons notre route par un sentier en balcon qui s'oriente à droite, au dessus de la vallée de Ferret.

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Cette boucle dans les alpages nous a permis de prendre de l'altitude mais en réalité, nous n'avons pas beaucoup avancé par rapport au hameau de Ferret. En voyant la piste, dans le fond de la vallée, on a même l'impression de n'avoir pas fait le bon choix. Si nous étions restés sur celle-ci, dès le départ du gîte, nous aurions progressé davantage vers le sud.
A flanc de montagne, le chemin serpente entre les arbustes et franchit quelques ravins où il faut faire preuve d'un peu plus d'attention. Après être redescendus à la côte de 1821 m, nous franchissons la ravine de La Peule puis une forte montée permet de rejoindre à nouveau l'alpage qui s'étale devant nous en direction des fermes d'alpage des Ars Dessus.

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Poursuivant notre ascension, dans les pentes herbeuses, nous ne tardons pas à parvenir au refuge de La Peule (2071 m).

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Au refuge, un groupe de jeunes ados s'apprêtent à quitter les lieux. Nous avions fait une halte à cet endroit, il y a 3 ans, pour la pause déjeuner. C'était un refuge à l'ancienne, avec des couchages originaux avec la paille comme matelas. Aujourd'hui, tout est en travaux. Des toiles de tente ont été installées sur la terrasse recouverte d'écorces de pins. Dommage, il n'y a plus le même charme.
Déçus, nous repartons aussitôt pour attaquer la montée finale du Grand Col Ferret.
Le sentier s'élève au dessus du refuge et s'oriente vers le sud. Des nigritelles poussent tout le long et en contrebas des jeunes marmottes gambadent sous l'étroite surveillance de mère marmotte qui pointe son nez à la sortie du terrier.
Dans un léger replat, un campeur s'est installé. En voyant un vélo près de la tente, nous nous rappelons l'avoir vu passé, la veille, à Ferret. Il n'allait pas vite, le bougre, avec son minuscule développement et ses doubles sacoches à l'avant et à l'arrière du vélo. Passer le col équipé de la sorte, sur un chemin en terre, il faut quand même le faire !
Le sol étant relativement souple et peu empierré, la montée est agréable. Côté météo, dès qu'un nuage masque le soleil, la température diminue brusquement en raison du vent de plus en plus froid. Les polaires ressortent donc du sac.
En sens inverse, un trailer descend en grandes enjambées. A ce rythme, s'il ne s'est pas foulé une cheville avant, il aura dépassé Champex dès ce soir !
Plus haut, nous croisons les premiers italiens qui nous confirment qu'au sommet il ne fait vraiment pas chaud.
Sur notre gauche, la grande Combe Revers de la Peula marque la fin de la vallée de Ferret, côté suisse.

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Devant nous, apparaissent furtivement les sommets enneigés du Mont Dolent ce qui nous donne un aperçu du panorama qui nous attend au sommet.

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Peu après le Creux de la Chaudière (2374 m), une marmotte avide de notoriété, veut bien se laisser photographier.

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Arrivés aux planfins ( 2483 m), le vent glacial, très violent, nous obligent à enfiler, à la hâte, la 3ème couche que constituent les vestes de pluies. La casquette qui menace de s'envoler est remplacée par le bonnet recouvert de la capuche. Les mains glacées, j'enfile aussi les gants. Les italiens avaient raison, il ne doit pas faire plus de 0 degré. Les rafales de vent sont tellement fortes qu'elles nous font tituber. Heureusement qu'il n'y a pas de ravin ! Tout cela confirme ce que nous savions déjà, les conditions météo changent très vite en montagne. Il n'y a pas 1 heure, nous étions en tee-shirt. Et encore, ne nous plaignons pas, le soleil fait de rapides apparitions. Quel contraste ! Dans le brouillard, l'endroit devient particulièrement hostile mais dès que les nappes s'élèvent, le spectacle redevient grandiose.
Sur la droite, la Tête de Ferret est recouverte d'une fine pellicule de neige fraîchement tombée.

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Après un léger replat, le sentier monte vers la gauche, dans la rocaille, en direction du sommet du col, maintenant bien en vue.
Près du sommet, nous croisons un petit groupe qui commence leur descente vers Ferret. Certains sont en short et en constatant la rougeur de leurs cuisses, nous hâtons le pas. On ne sait jamais, l'idée pourrait leur venir de réchauffer leurs gambettes en nous dépouillant de nos falzars !!! C'est certain, la prochaine fois, ils garderont les manches longues même s'il fait 40° dans la vallée !.
Un petit névé relativement glissant, et le sommet du Grand Col Ferret ( 2537 m) est enfin atteint. Adieu la Suisse, bonjour l'Italie !

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Le vent a au moins un avantage, balayer les nuages qui finissent par se décrocher des sommets. Comme un rideau qui s'ouvre, le spectacle devient magnifique sur le Mont Dolent et sur la large vallée du Val Ferret italien.

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Malgré ce splendide décor, nous ne restons pas longtemps au sommet où il est impossible de prendre des photos sans bouger à cause de ce vent toujours aussi fou.
Le sentier descend presque en ligne droite, vers la vallée, en offrant en permanence, une vue imprenable sur les plus hauts sommets italiens du Mont Blanc. Allongeant le pas, nous atteignons rapidement la côte de 2463 m et déjà, il fait nettement moins froid. De l'autre côté de la vallée, l'imposant glacier de Pré de Bar semble suspendu à flanc de montagne.

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Après un large lacet dans l'alpage, nous surplombons le refuge Elena.

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La descente devenant plus rapide, les lacets sont plus rapprochés.
C'est l'heure de la rencontre avec le flux quotidien des randonneurs. Ce sont en majorité des italiens. Ils prennent le vent en pleine poire à la sortie de chaque lacet orienté vers le sommet du col. Certains sont déjà tellement emmitouflés qu'on se demande ce qu'ils vont pouvoir mettre en plus, une fois arrivés en haut.
Parvenus au refuge Elena, ( 2062 m) , nous pensons y faire la pause déjeuner mais, bien en évidence, sur la terrasse, un panneau signale que le pique nique est interdit. Pas trop de regrets, de toute façon, même sans cette interdiction, nous n'y serions pas restés par peur de voir Eole, le tout puissant, s'emparer de notre casse-dalle pour l'entraîner au fond de la vallée.
En tenant fermement les casquettes d'une main, nous quittons le refuge par l'arrière par un petit sentier qui passe près des ruines de l'ancien refuge détruit par une avalanche dans les années 50. Nous continuons ainsi notre descente en laissant à droite, en contrebas, une plus large piste qui longe le torrent qui s'écoule du Glacier de Pré de Bar.
Plus bas, un pont récemment rénové, permet de franchir un petit torrent. Le sentier continue en balcon et une fois de plus, nous en prenons plein les yeux en admirant la cime enneigée de l'Aiguille du Triolet.
A l'entrée d'une combe, c'est l'heure de pointe ! Cà bouchonne ! Un névé occupe toute la largeur de la combe. La traversée n'est pas très longue mais le névé descend de plus de 50 m à flanc de montagne. Dans les deux sens des randonneurs attendent de pouvoir passer et ce n'est pas une deux fois deux voies. C'est même une voie à pas unique si on ne veut pas se casser la gueule ! Dans ces conditions, nous allons devoir patienter un certain temps avant de nous lancer dans l'aventure d'autant plus que les priorités de passage n'ont pas été clairement définies ! Tout cela est pour nous un bon prétexte pour contourner l'obstacle. Usant de notre stratégie habituelle, nous décidons de passer en dessous du névé. La descente dans l'alpage va s'avérer plus périlleuse que prévue mais en avançant avec précaution nous parvenons à nos fins. Et en parlant de faim, c'est l'heure, le ventre gargouille. Notre petite dérivation nous ayant écartée du sentier, nous voici dans un endroit idéal pour la pause repas. Comme nous sommes un peu plus en contre bas, nous ressentons moins le vent et pour couronner le tout, nous pouvons profiter du paysage grandiose durant tout le repas avec devant nous le glacier du Triolet et à nos pieds, la vallée de La Vachey.

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Nous pensions être tranquille au milieu des rodhos mais, au dessus de nous, ayant eux aussi quitté le sentier , un petit groupe d'italiens avec un chien, tente de nous rejoindre. Arrivés à notre niveau, ils nous demandent par où nous sommes passés. Nous leur expliquons, dans notre jargon, que nous avons contourné le névé par le bas et qu'ils peuvent faire de même. Mais nous finissons par comprendre que ce n'est pas leur souci. Leur problème, c'est le chien. Plus bas, sur le sentier, il y a des vaches et ils ont peur de ne pas pouvoir retenir le cabot. Ils sont tout de même quatre. Super costaud le cabot ! Ils veulent dons rejoindre la piste qui longe le torrent mais qui se trouve beaucoup plus bas. Nous, qui avons déjà eu du mal à descendre seulement d'une cinquantaine de mètres, nous ne les conseillons pas de tenter l'aventure. C'est cependant le chien qui aura le dernier mot, le voilà parti dans la pente obligeant les quatre italiens beaucoup moins rassurés que lui à le suivre. Tous disparaissent rapidement dans la pente derrière les arbustes nous laissant ainsi finir notre casse-croûte tout en restant à l'écoute d'un éventuel appel à l'aide !
Le casse croûte terminé, nous remontons vers le sentier en reprenant dans l'autre sens, les traces laissées par les italiens.
La remontée est difficile et bien que nous n'étions pourtant pas très éloignés du sentier, sur ces pentes abruptes, nous ne revoyons celui-ci qu'au dernier moment ce qui confirme qu'il vaut toujours éviter de quitter les sentiers balisés.
Revenus sur un terrain plus stable, nous reprenons notre route en direction d'Arnuva.

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Tout en restant parallèle à la vallée, le sentier descend plus brutalement. C'est ici que nous découvrons le troupeau de vaches qui a provoqué le repli stratégique des italiens.

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Le sol devenu plus sableux provoque quelques dérapages involontaires ce qui n'est pas du goût de nos orteils déjà bien meurtris par cette longue descente. La tentation est grande pour les randonneurs de couper les derniers lacets mais de fragiles clôtures de branchages érigées en petite rambardes à chaque virage les en dissuade. Le but de ces fragiles constructions est d'éviter que chacun puisse faire sa trace dans l'alpage ce qui aurait pour conséquence d'aggraver les ravinements causés par les fortes pluies.
Le sentier débouche sur la large piste qui monte au refuge Eléna. Un groupe de vététistes y arrivent en même temps que nous. Sous leurs casques et leurs lunettes nous pensons reconnaître le groupe d'anglais rencontrés au refuge de Ferret. Autre rencontre, devant nous, sur la piste marchent nos quatre italiens accompagnés de leur chien. Ils semblent tous en pleine forme, surtout le chien qui tire toujours autant sur sa laisse.
Quel plaisir de marcher sur un sol totalement plat ! Nous sommes à Arnuva et il y a foule. Des centaines de véhicules sont garés le long de la piste. C'est le point de départ de nombreuses randonnées. C'est aussi ici qu'arrive la route en provenance de La Vachey et nombreux sont les randonneurs du Tour du Mont Blanc qui empruntent cette partie en bus depuis Courmayeur.
Arnuva, (1769 m) c'est surtout un grand parking avec un bâtiment faisant office de restaurant. Les torrents en provenance des glaciers et des montagnes environnantes s'y regroupent dans un amas de roches pour donner naissance à la Doire de Ferret.
Nous laissons la petite route de La Vachey pour bifurquer à gauche. Le sentier s'élève, de suite, dans l'alpage, au dessus du restaurant d'Arnuva. Difficile pour nous de retrouver le rythme sur une pente aussi raide. A nouveau, nous retrouvons le calme. De lacets en lacets, nous nous élevons face au Val de Bellecombe jusqu'à un chalet d'alpage joliment campé à flanc de montagne.

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Nous sommes revenus à 2000 m et nous y resterons jusqu'au refuge Bonatti. Le sentier reste en balcon au dessus du Val Ferret de l'autre côté duquel domine les glaciers de Gruetta et de Frebouze, l'Aiguille de Leschaux et les Petites Jorasses.

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Le vent est toujours présent, moins froid mais encore violent. Devant nous apparaît le refuge Bonatti, terme de notre étape.



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Le refuge nous semble relativement proche maintenant mais nous allons trouver le final beaucoup plus longuet à cause du franchissement de deux combes. La première est située au dessus du chalet de Gioé. Une seconde large boucle permet de passer la combe de Malatra dont nous franchissons le tumultueux torrent sur un solide pont.

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Le refuge n'est plus à portée de vue et ce n'est qu'après avoir dépassé les granges de l'Alpe de Malatra que nous allons le découvrir légèrement en dessous de nous.

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Il est à peine 15 heures. Nous connaissons le refuge pour y avoir pique niqué sur la terrasse, il y a trois ans. Situé à 2025 m d'altitude, c'est un très grand bâtiment dont la construction remonte seulement à 1998. Il est dédié au célèbre alpiniste Walter Bonatti. D'une capacité de 80 places, le refuge attire de nombreux touristes, il faut dire qu'il n'y a qu'une petite heure d'ascension depuis La Vachey.
Nous y sommes très bien bien accueillis par une jeune fille parlant français. Au sous-sol se trouvent les douches et un local permettant de faire sécher les vêtements. Toujours au sous-sol, un autre petit local permet d'entreposer chaussures et bâtons. Au rez de chaussée se trouvent le bar et une vaste salle de restaurant possédant de larges baies vitrées orientées vers le glacier de Frebouze et plus à l'est les Grandes Jorasses. Les dortoirs sont à l'étage. Nous avons droit à un petit dortoir de 6 places, très bien agencé avec notamment de larges tiroirs pour ranger les affaires. Nous allons le partager avec 2 français. Ce sont de jeunes et solides gaillards. Il y a aussi 2 belges, le père et le fils qui effectuent le Tour du Mont Blanc. Le père a l'expérience des randonnées en montagne mais je reste un peu perplexe lorsqu'il nous signale avoir été pris sous l'orage, il y a 3 jours au Col des Fours. Cette variante du TMB est vivement déconseillée en cas de mauvais temps mais visiblement cela n'a pas eu d'effet sur lui. D'après ses dires, il n'y a vraiment aucun danger. Comme quoi, chacun fait comme bon lui semble mais il n'est alors pas étonnant que de temps en temps, la montagne rappelle à l'ordre certains aventuriers. Demain le père et le fils vont jusqu'à Ferret où ils prendront le bus pour rejoindre Champex.
La douche prise, c'est à l'extérieur et en plein vent que nous prendrons notre petite boisson réconfortante. L'étape a été difficile avec 6 h 45 de marche et 1088 m de dénivelé. Cette journée a surtout était marquée par la très longue ascension du Grand Col Ferret. Nous n'oublierons pas le vent glacial rencontré au sommet mais nous retiendrons surtout le très beau décor qui nous a jamais quitté depuis le sommet du col. La fin de l'étape s'est avérée un peu longue en nous donnant l'impression que le refuge s'éloignait au fur et à mesure que nous avancions.
Les rafales de vent étant toujours aussi fortes nous nous replions à l'abri du mur de la façade principale du refuge. Des bancs sont installés face aux magnifiques sommets enneigés. Jumelles en main, je passerai de longues minutes mais sans succès à essayer d'apercevoir les alpinistes s'apprêtant à bivouaquer sur ces pentes abruptes.
Tels des lézards, nous nous dorons ainsi au soleil en attendant l'heure du repas. Les places sont cependant chères et nous devons nous serrer un peu pour permettre à un trio d'italiens d'occuper aussi les lieux. A peine installés, ceux-ci vont s'empresser d'allumer chacun un cigare. Comme je l'ai souvent remarqué, la fumée va toujours en direction de celui qui ne fume pas. Confirmation, aujourd'hui, c'est encore le cas, en Italie et à 2000 m d'altitude ! Merci les pollueurs ! C'était peut-être un moyen de nous faire quitter le banc ! Raté, nous sommes restés tout en fulminant intérieurement !
A 19 heures, la vaste salle de restaurant est remplie à craquer. Nous partageons la table avec nos compagnons de dortoir mais aussi avec un couple de français originaire d'Albertville. Lui, tout comme moi, étant retraité depuis peu, la conversation s'engage naturellement. C'est un montagnard qui n'a pas sa langue dans sa poche. Dès lors c'est une discussion à bâtons rompus qui s'engage en abordant une multitude de sujets sur la société actuelle, le sport, le dopage, les voyages, les spécialités régionales, les randonnées et la politique. Encore un qui n'a pas voté pour Sarkozy. C'est dingue depuis qu'il a été élu, je n'ai pas encore trouvé quelqu'un qui a voté pour lui ! C'est à croire que les élections ont été truquées où alors j'ai affaire à une sacré bande de faux-culs. Quoiqu'il en soit, nous sommes d'accord sur bien des points et je ne vais pas voir passer le repas pourtant excellent. En entrée, comme c'est la tradition en Italie, nous avons eu droit à une bonne platée de pâtes suivie d'une polenta, pardon polente ! accompagnée de pommes de terre, de lentilles et encore de pâtes. Une crème au chocolat complète le tout sans oublier les petits gâteaux secs sur lesquels est gravé le nom de Bonatti. Notre ami est un véritable fan de Walter Bonatti. Il connait tout de lui et il monte régulièrement au refuge uniquement pour cela. Il ne doit pas être déçu. Sur les murs de nombreuses photographies relatent les exploits de l'alpiniste et dans la petite bibliothèque pratiquement tous les ouvrages sont en son honneur.
Au cours de cette soirée, j'apprendrais de notre ami savoyard que le col de la Forclaz se prononce Forcla sans le "Z", tout comme La Cluzas et qu'il existe un mouvement politique prônant l'indépendance de la Savoie. C'est en tout cas ce que j'ai pu comprendre dans le brouhaha de cette salle de restaurant qui limitait la conversation à son plus proche voisin. Le hasard a voulu que je tombe sur le plus bavard de la soirée. Sa compagne plus jeune que lui s'est aussi montrée beaucoup plus discrète. Tous deux semblent vivre un amour récent. A 21 h, nous les quittons tout en pensant que le refuge Bonatti peut être un excellent alibi pour les couples à la recherche d'aventure pas forcément montagnarde.
Avant de regagner le dortoir, je fais le tour du refuge. La nuit tombe et le calme s'installe. Le vent lui aussi a décidé de se coucher.
A 21 h 15 c'est l'extinction des feux.

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