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Mercredi 16 juillet 2008.

Ca commence bien ! A peine partis, nous trichons !
Ne pouvant laisser notre véhicule sur le tout petit parking du gîte Le Cret, c'est en voiture et par une descente que commence cette première étape.

Un km plus bas, un grand emplacement situé face aux télécabines du Prarion, sert de parking pour les randonneurs. Le lieu nous est familier puisque, c'est ici que nous avons terminé, il y a 3 ans, notre premier Tour du Mont Blanc. Nous y laissons la voiture en espérant la retrouver, au même endroit, dans douze jours.
Dernière vérification pour s'assurer que nous n'oublions rien et à 9 h 30, c'est parti !
Sacs à dos sur les épaules, entre 13 et 14 kilos pour moi et entre 10 et 11 kilos pour Jacqueline. C'est lourd la première fois mais dans quelques jours nous n'y ferons plus attention.
Sous un très beau ciel bleu, la journée s'annonce magnifique. Le décor est planté avec, sur notre droite, les cimes enneigées du Mont Blanc.

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Nous traversons le village des Houches sur toute sa longueur, en passant d'abord devant la gare de téléphérique de Bellevue puis en remontant légèrement jusqu'au centre. Le bulletin météo affiché au syndicat d'initiative annonce une belle journée mais les nuages doivent arriver en fin de soirée et des averses sont à craindre pour le lendemain. Raison de plus pour profiter pleinement de cette première journée.
Seconde halte un peu plus loin, le temps d'acheter du jambon à la supérette et du pain à la boulangerie. Les restes du pique nique du voyage complèteront notre casse-croûte de la mi-journée. Si certains randonnent avec seulement des barres de céréales, ce n'est pas notre cas et tant pis si le sac est plus lourd, mieux vaut avoir des réserves au cas où.... et puis n'exagérons rien nous n'emportons tout de même pas les boîtes de cassoulet, le cubi de rouge et la miche de 2 livres !

La traversée des Houches continue sur le plat. A la sortie du village, nous prenons à gauche un large escalier avec des marches en rondins avant de retrouver, quelques mètres plus bas, la route d'accès aux Houches. Il y a 3 ans, en sens inverse, cette ultime montée, pourtant très courte, avait fait grimacer plusieurs d'entre nous. C'était la fin de notre périple. Partis du refuge du Lac Blanc cette dernière étape avait été particulièrement longue. Nous ferons beaucoup plus court aujourd'hui, mais nous avons 3 ans de plus et surtout, Mica, le mulet, n'est pas là pour porter une partie de nos affaires.

Sur un pont nous franchissons du même coup, l'autoroute et l'Arve.
Fini de rire, les choses sérieuses commencent. A droite, la route s'élève brusquement le long du barrage de l'Arve. Quelques mètres plus haut, nous la quittons pour prendre, encore à droite, une route plus étroite qui pénètre en forêt. Un sentier part à l'horizontale puis serpente rapidement entre les épicéas. La pente s'accentue fortement. Il commence à faire chaud, heureusement, la majeure partie de l'ascension va s'effectuer en forêt. Vers le hameau du Coupeau où plusieurs chalets sont en construction, une trouée dans la forêt nous offre une très belle vue sur les Houches et le Col de la Voza.

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Le sentier bifurque nord-est pour atteindre la statue du Christ Roi (1268 m). Si la statue par elle même est assez impressionnante avec ses 17 m de haut, c'est surtout le panorama qui va nous inciter à poser nos fesses sur un banc idéalement placé en surplomb de la vallée des Houches avec une vue grandiose sur l'Aiguille du Midi et le Mont Blanc. Nous resterons de longues minutes à profiter du paysage. Seul petit bémol, le bruit du trafic routier s'élève de la vallée, c'est un grondement continuel qui contraste avec le calme de la forêt qui nous entoure.

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La montée continue, toujours en forêt, avec des passages très pentus. Au plus fort de la pente des marches facilitent l'ascension. Puis le sentier débouche sur une petite route au fort pourcentage qui conduit à l'entrée du parc animalier de Merlet. (1419 m). Nous la suivons sur notre droite sur 300 m jusqu'à un premier parking où sont stationnées de très nombreuses voitures. Leurs propriétaires doivent visiter le parc animalier car nous n'avons pas rencontré grand monde jusque présent.
En plein soleil, nous continuons notre progression. Nous retrouvons la fraîcheur en prenant à gauche un plus petit sentier toujours aussi pentu. Le chemin longe le parc animalier. Nous essayons d'apercevoir des animaux mais les seuls que nous verrons n'ont que deux pattes et portent un sac à dos.
Notre ascension est marquée par de très nombreux arrêts afin de ne pas mettre la machine en surchauffe. Même si nous sommes entraînés, une casse de moteur le premier jour est toujours possible. Jacqueline monte à son rythme. De mon côté, je suis tout de même un peu inquiet face à la difficulté. Nous avons à peine débuté et cette première étape qui nous semblait n'être qu'une simple mise en jambe s'avère beaucoup plus difficile que prévu. Autre inquiétude, je ressens une douleur à mon genou gauche. La gêne se manifeste à chaque appui sur une marche et elles sont nombreuses !
Joignant l'utile à l'agréable, nos arrêts multiples nous donnent l'occasion de profiter du paysage toujours aussi grandiose.

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Plus haut, le sentier sort de la forêt pour franchir le torrent de La Paz (1690 m). Premières difficultés techniques, le passage est équipé de mains courantes. A la sortie, entre les blocs de rochers, un jeune couple pique-nique. Ils ont avec eux une petite fille qui doit avoir 4 ou 5 ans. Les voir se restaurer nous donne envie de faire de même. Un endroit ombragé avec une très belle vue sur le massif du Mont Blanc et le glacier des Bossons va faire l'affaire.
A nous le casse-croûte ! Il faut prendre des forces, la montée n'est pas terminée même si nous avons fait le plus difficile, du moins nous le croyons....
Aux jumelles, on distingue les voies d'accès au sommet du Mont Blanc. Nous apercevons des petites colonnes de randonneurs qui redescendent, minuscules fourmis au milieu de cette immensité blanchâtre. Le panorama est extraordinaire, on ne s'en lasse pas.
Nous nous sommes arrêtés au bord du sentier déjà quelques randonneurs, sans doute partis pour la journée, commencent à redescendre. C'est le bonjour habituel accompagné du traditionnel bon appétit ! Montent alors le jeune couple rencontré plus bas. La petite est surprenante, elle marche devant, d'un bon pas, ses jambes sont pourtant bien petites par rapport à la hauteur des marches taillées dans le sentier. Les racines ne sont pas non plus un obstacle pour elle. Avec son petit sac à dos duquel dépasse une poupée Barbie, elle est dans son élément. Ce sera une montagnarde, c'est certain !
Après trois quart d'heure de pause, il est temps pour nous de reprendre la grimpette.
Quelques centaines de mètres plus haut, le sentier vire brusquement à gauche, l'a pic est impressionnant sur la vallée de Chamonix.

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Le sentier continue en lacet, toujours aussi pentu puis finit par déboucher au bord du ravin des Vouillourds (2034 m). Les randonneurs sont maintenant plus nombreux c'est le signe que le refuge n'est plus très éloigné. Encore un dernier effort dans l'alpage pour franchir un torrent et ce n'est qu'au tout dernier moment, après avoir laissé sur notre gauche le sentier menant à l'Aiguillette des Houches, que nous pouvons enfin voir le toit du refuge tant attendu.
Il est environ 14 h et il y a encore beaucoup de monde, c'est la fin de la pause repas pour les randonneurs qui s'apprêtent à redescendre dans la vallée. Le refuge Bellachat est situé à 2151 m d'altitude. Il est idéalement bien placé avec sa terrasse en surplomb sur toute la vallée de Chamonix.

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La vue est imprenable sur le Mont Blanc, l'Aiguille du Midi, les glaciers des Bossons et des Pélerins. C'est le refuge type d'altitude avec son ossature en bois. Sous la terrasse il y a un premier dortoir, au rez de chaussée se trouve la salle à manger et le coin cuisine, à l'étage supérieur un second dortoir beaucoup plus grand. Deux jeunes filles nous accueillent et nous invitent gentiment à déposer nos sacs dans la salle à manger. Nous pouvons également y laisser nos chaussures de marche et aller nous rafraîchir dans une toute petite salle de bain située à l'extérieur du refuge en bout de la terrasse. Le plafond n'est pas à hauteur réglementaire, je ne l'avais pas vu mais mon crane l'a senti. Une bosse de plus... c'est pas grave la casquette tiendra mieux si le vent souffle ! Il n'y a pas de douche, juste un petit lavabo. C'est vraiment rudimentaire, mais nous apprécions de pouvoir nous laver et nous changer avant l'arrivée des autres randonneurs.
Les toilettes se trouvent aussi à l'extérieur du refuge. En fait, il n'y a qu'un seul chiotte à la turque. Si le refuge est complet, c'est pas le moment d'avoir la courante !
Lavés et changés, nous nous installons sur la terrasse pour profiter du panorama et apprécier une boisson rafraîchissante bien méritée.

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C'est le moment de faire le bilan de cette première journée. La montée au refuge s'est avérée être beaucoup plus difficile que ce que nous avions envisagé avec au total 1143 m de dénivelé. Jacqueline a terminé cette étape relativement fatiguée et la douleur que j'ai ressenti à mon genou n'est pas faîte non plus pour me rassurer sur la suite de la rando. Si c'est tous les jours comme cà nous aurons du mal à aller au bout. Ceci, c'est pour le côté négatif. Mais le côté positif l'emporte très largement avec d'une part une météo idéale et d'autre part des paysages grandioses que nous avons pu admirer durant toute la montée. Nous l'apprécions encore plus en nous souvenant qu'il y a 3 ans, il nous avait fallu attendre les derniers jours pour pouvoir profiter d'un aussi beau spectacle.
Le calme est revenu au refuge, le gros de la troupe est redescendu dans la vallée. Seuls, quelques attardés dégustent une omelette et à côté de nous se trouve le jeune couple et la petite que nous avons rencontrés à la mi-journée. Ce sont des étrangers, vraisemblablement d'origine anglaise. La mère peint en prenant pour modèle le massif du Mont Blanc. La gamine, imitant sa mère, barbouille avec application et en silence sa feuille de papier. Jamais nous ne l'avons vu manifester le moindre signe d'énervement ce qui aurait été bien compréhensif à son âge après une journée aussi difficile. Si nous étions plus jeunes cela nous donnerait l'envie d'en avoir une douzaine comme elle !
En dialoguant avec les jeunes filles qui s'occupent du refuge nous apprenons qu'elles redescendent dans la vallée un weekend sur deux. Quand il faut revenir embaucher le lundi matin, elles ne sont pas gênées par les embouteillages mais il faut un sacré courage pour se taper les 1000 m de dénivelé depuis Chamonix !
Une partie du ravitaillement destiné au refuge se fait par le même chemin, à dos d'homme, plusieurs fois par semaine. L'autre partie est acheminée par l'hélicoptère qui entre en action plusieurs fois dans la saison.
Nos hôtes nous apprennent que le refuge sera complet ce soir et qu'un groupe CAIRN est attendu. C'est l'organisme que nous avions choisi pour effectuer notre premier Tour du Mont Blanc. Ce sera peut être pour nous l'occasion de revoir le guide qui nous avait accompagné.
Vers 16 h, nous avons l'autorisation de prendre possession du dortoir.

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Nous sommes les premiers mais pour une question d'organisation nous n'avons pas pour autant le choix de l'emplacement. Nous serons dans le dortoir du haut. Celui-ci comprend des couchages sur deux niveaux de chaque côté des sous-pentes. Pour nous, ce sera en haut et à droite, près de la petite fenêtre. Jacqueline est "ravie" de cette petite montée supplémentaire pour faire le lit !
Dilemme ! Dans quel sens dormir. Première solution, la tête côté couloir mais nous risquons d'avoir le courant d'air de la fenêtre en pleine poire ! Dans les refuges, la chaleur humaine fait que les fenêtres restent entre-ouvertes toute la nuit. C'est bien pour celui qui couche au fond, çà l'est moins pour celui qui dort à proximité de la fenêtre. Reste la solution de dormir dans l'autre sens. C'est l'option que nous prenons en ayant à l'esprit que dans ce cas, il ne faut pas se lever trop brusquement sous peine d'être rudement rappelé à l'ordre par les poutres du toit. Autre inconvénient si votre voisin de couchage s'allonge dans l'autre sens, bonjour les coups de pieds dans la tronche et je ne vous parle pas de l'odeur ! Tant pis on verra bien.
Le couloir qui sépare les deux rangées de couchage ne nous semble pas suffisamment large pour y laisser nos sacs à dos aussi nous redescendons ces derniers dans la salle à manger où sont toujours rangées nos chaussures.
Il est près de 18 h lorsque arrive le groupe CAIRN. Ils viennent du Brévent. Ce n'est pas notre guide qui les accompagne mais un jeune avec qui nous essayons d'engager la conversation mais qui visiblement n'est pas trop disposé à causer. Il frime un peu avec ses lunettes de soleil et semble plus attiré par d'éventuelles rencontres féminines que par celle des deux vieux quinquas que nous sommes. Nous arrivons tout de même à savoir que notre guide a pris un peu de recul mais qu'il lui arrive de revenir en renfort pour accompagner des groupes lorsque cela est nécessaire. Point final, nous n'en saurons pas plus !
Le groupe est composé de 10 personnes et sur les 10 il y a 9 anglais et un seul français. Espérons pour ce dernier qu'il parle anglais ! Deux autres randonneurs font partie du groupe mais ont choisi de randonner "en liberté". C'est bizarre comme expression pour une ballade en pleine nature mais c'est le terme habituellement employé. Cela ne veut pas dire que les autres doivent marcher enchaînés avec un boulet au pied ! Ils bénéficient de toute l'organisation du groupe CAIRN, réservations refuges, transport de sacs, pique nique et guide mais ils doivent rester en groupe toute la journée. Les randonneurs "libres" ont les mêmes prestations à l'exception du portage de sacs et du pique nique et ne retrouvent le groupe que le soir au refuge. Nos 2 randonneurs "libres" ne tardent d'ailleurs pas à arriver, il s'agit de deux belges, le père et son fils âgé d'une dizaine d'années.

De notre poste d'observation sur la terrasse, nous dominons toute la vallée.

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Le trafic routier est dense. Sur la route ça bouchonne sur plusieurs kilomètres en direction des Houches, de nombreux camions sont aussi à l'arrêt sur la route en lacet menant à l'entrée du tunnel du Mont Blanc. Quel contraste entre cette vie trépidante et le calme du refuge ! Nous nous sentons progressivement déconnectés du monde et l'aventure ne fait que commencer.
Comme annoncé, le temps change. Les premiers nuages s'accrochent au sommet du Mont Blanc et la température a fortement baissé. Normal, nous sommes tout de même à plus de 2100 m d'altitude. Repli stratégique dans la salle à manger du refuge où d'autres randonneurs sont maintenant arrivés si l'on en croit le nombre important de chaussures alignées le long du mur.
Le repas étant prévu à 19 h, nous passons le reste du temps à feuilleter des revues mises à notre disposition.

Peu à peu la salle à manger se remplit. A part nous, il n'y a que le français du groupe CAIRN. Si c'est comme çà tous les soirs, cela ne va pas être facile de communiquer. Le Tour du Mont Blanc a beaucoup de succès chez nos voisins allemands et anglais mais aucun d'eux ne comprend le patois limousin, seule seconde langue que nous maîtrisons à peu près.
Arrivent alors 3 derniers randonneurs. Ouf ! Ceux là sont français. Ils parcourent une partie du GR5 et sont partis ce matin du refuge de Moëde Anterne en passant par le Brévent. Une belle étape qui visiblement a laissé des traces vu leur arrivée tardive. Partis déposés leurs sacs au dortoir, nous les attendons pour passer à table. Mais quelle est donc cette odeur qui s'est répandue dans la salle à manger ? Tout le monde l'a sentie et tous les regards se sont dirigés vers les chaussures. Sans un mot tout le monde s'est compris. Pas besoin de parler français ! C'est une évidence parmi les 3 derniers arrivants, il y en a au moins un qui a sérieusement transpiré des pieds. C'est cela aussi le charme des refuges !
A table, nous nous retrouvons avec les 3 randonneurs du GR5. Ils ont la cinquantaine passée. Deux sont originaires de Bretagne le troisième de Normandie. Ils leur restent 2 étapes à faire et s'inquiètent de la météo d'autant plus qu'il y a 3 jours, ils ont eu droit à la neige et n'en garde pas un bon souvenir. Leurs épouses doivent les récupérer en voiture à Bourg Saint Maurice sauf si elles ont rencontré de jeunes savoyards en cours de route.
A notre table, il y a aussi un jeune couple d'allemands qui seront nos voisins de couchage. (ceux qui vont peut être nous balancer des coups de pieds dans la tronche !).
Le repas est très vite expédié. Potage très apprécié, omelette, pâtes malheureusement sans aucun rab et compote. A 20 h tout est terminé.

Avant de regagner le dortoir, je décide de faire un petit tour à l'extérieur afin de repérer le sentier de départ du lendemain en direction du Brévent. Il fait froid et le vent commence à souffler. Deux trailers passent alors et montent vers l'Aiguillette des Houches. Le dénivelé ne semble pas les gêner pas plus que l'obscurité qui ne va pourtant pas tarder !
Couché à 20 h 30, la nuit ne va pas être excellente pour moi. Le niveau de fatigue de Jacqueline me perturbe tout comme mon genou qui me fait souffrir même au repos. Le vent qui va souffler très fort toute la nuit n'annonce, non plus, rien de bon pour le lendemain et nous allons devoir monter encore plus haut peut être sous la pluie. Je n'ai donc pas beaucoup dormi pour cette première nuit ce qui m'a permis de sentir sur une joue la douce caresse des pattes velues d'une grosse araignée. Voilà ce que c'est de coucher la tête à la place des pieds ! Jacqueline ne sera informée de cette petite visite que plusieurs jours plus tard par crainte qu'elle ne mette fin brutalement à notre rando. Avec les araignées, ce n'est pas le grand amour !

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